Le 7 août dernier, l’Équipe de France est devenue Championne Olympique pour la première fois de son histoire. Nicolas Le Goff, qui a commencé à pratiquer le volley en Île-de-France, revient sur cette belle aventure et sur son parcours dans cette interview qu’il a accordé à notre Ligue.

Tout d’abord, félicitations pour votre titre ! Quel effet ça fait d’être Champion Olympique ?

C’est difficilement explicable, c’est un sentiment qu’on a tous mis du temps à réaliser. On commence à descendre de notre petit nuage tout doucement. C’est une sensation extraordinaire. Avec le retour en France, la ferveur, l’engouement des gens, a pris conscience de notre statut. On ne s’y attendait pas forcément, c’est le graal. Ça concrétise tout le travail et tous les sacrifices, c’est la plus belle des récompenses.

Quelle a été la force de votre équipe ? On vous a vu en difficulté au début lors des matchs de poules, et ensuite vous avez déroulé…

On a été plus qu’en difficulté pendant les poules. Notre force c’était notre état d’esprit. On démarre mal la compétition, on se voyait clairement éliminés après le 3ème match. On a eu la force de continuer, d’y croire, même si c’était dur. Justement ça nous a servi, on a eu un changement d’état d’esprit. On s’est dit « Bon les mecs on est quasiment éliminés, on va maintenant jouer pour le plaisir. On est une bande de potes, on sait jouer au volley, on va arrêter de penser au résultat, on va juste jouer notre jeu, prendre du plaisir. » C’est ce qui a fait basculer la situation, on ne pensait plus au résultat, mais plutôt à jouer match après match. On ne s’est pas énervés, même quand on a été en difficulté. On a un bon groupe, une bonne ambiance, notre amitié est plus forte que ça.

C’est peut-être ce qui a fait la différence avec Rio, ou vous n’aviez pas réussi à renverser la situation…

Ce qui a fait la différence avec Rio, c’est qu’à ce moment-là, on sortait d’un été 2015 plein, on avait remporté la Ligue Mondiale. On nous avait positionné parmi les favoris, et on avait accepté ce rôle. On avait pour objectif d’aller chercher une médaille, et quand ça n’a pas tourné en notre faveur, nous n’avons pas réussi à sortir de là. On avait une mauvaise pression. Ce qu’on n’avait pas à Tokyo. Avant les Jeux, on n’avait pas vraiment d’objectif, on savait que ça allait être difficile avec la poule de la mort. On s’était dit que si on sortait de la poule c’était bien, on n’avait pas la pression du résultat. On s’est dit : « On fera les comptes à la fin ».

Comment avez-vous vécu les conditions sanitaires à Tokyo, le fait de jouer sans public ? Est-ce que ça a joué en votre faveur, le fait d’être dans votre bulle ?

Peut-être… Le fait de ne pas avoir de public, c’est la seule chose qui a changé, sinon dans le village, la vie était normale, toutes les délégations et tous les sports étaient ensemble. Pour les sports co, le public est important. Mais ça fait un an qu’on ne joue devant personne en club, donc a on n’a pas eu de choc. On avait pris l’habitude. À la fin de la compétition, on s’est fait la réflexion. On s’est dit « s’il y avait eu du monde, ça aurait été quelque chose ». Mais avec le recul, on ne veut rien changer. Peut-être que s’il y avait eu 5000 ou 6000 supporters polonais dans la salle en quart, ça aurait transcendé les joueurs, et le résultat aurait été différent. C’est vrai que c’est dommage, mais on est Champions Olympique. Après c’est sûr que jouer devant des salles vides ce n’est pas ce qu’il y a de plus fun. On a réussi à passer outre.

Vous réalisez que vous avez changé la vision du volley en France ? C’est un sport peu ou mal médiatisé en France, mais grâce à vous, peut-être que certains jeunes vont vouloir s’inscrire en club ou reprendre la pratique…

On en prend conscience petit à petit, notamment quand on croise des gens dans la rue, qu’ils nous reconnaissent et nous félicitent et nous disent « Vous m’avez fait découvrir le volley, ce n’était pas un sport que je suivais ». C’est ça la magie des Jeux, il y a un large public qui se prend au jeu. Si on a pu susciter des vocations, tant mieux. On entend que certains clubs ont dû refuser des jeunes, tellement ils étaient nombreux à vouloir s’inscrire. C’est dommage de devoir refuser des gens mais si on peut faire grandir et évoluer notre sport, c’est tout bénef.

Ça va peut-être pousser les clubs, les ligues et la fédération à agrandir les structures…

J’espère, c’est ce que je souhaite. Nous on a fait « notre part du travail ». Maintenant il faut faire bouger les choses et faire grandir le volley à tout point de vue.

Vous êtes déjà de retour pour la préparation de l’Euro après seulement quelques jours de repos ? Ce n’est pas trop compliqué d’enchainer avec les Jeux ?

Si c’est un peu compliqué, on ne va pas se le cacher. Ce n’est pas la première fois qu’on enchaine deux compétions comme ça durant l’été, mais c’est particulier parce qu’on est allé au bout des Jeux. Sortir d’un titre olympique et devoir se replonger dans la préparation et la compétition quasiment tout de suite après, ce n’est pas évidement. Certaines équipes comme l’Italie ou la Pologne vont vouloir se racheter, d’autres qui n’étaient pas aux Jeux préparent ça depuis le début de l’été. Ça ne va pas être facile, il faut qu’on switche, qu’on passe en mode Championnats d’Europe. Ce n’est pas évident, ça fait partie du job, on essaye de le faire du mieux possible. Avec le changement de staff, ça aide. Le nouveau coach arrive avec une autre vision, un nouvel état d’esprit, et ça nous plonge tout de suite dans nos nouveaux objectifs. La reprise est difficile physiquement mais ça va bien se passer.

Quels sont tes prochains objectifs personnels ?

Les Championnats d’Europe dans l’immédiat, même si l’objectif principal de l’été est clairement atteint. Après si on peut aller confirmer et concrétiser par une médaille à l’Euro, on va tout faire pour. Ensuite, la saison en club reprend, c’est encore un nouveau challenge. Je pense que ce n’est pas parce qu’on a atteint le graal que tout ce qui suit n’a pas d’importance. La vie de sportif professionnel, c’est prendre chaque compétition comme si c’était la seule et la plus importante. Il faut se remobiliser à chaque fois. On a aussi un gros objectif l’été prochain avec les Championnats du Monde. C’est la seule compétition où notre génération n’a pas gagné de médaille. Et forcément, notre point de mire, c’est Paris en 2024. Et ça va arriver vite !

Tu as commencé à pratiquer le volley au Nord Parisien… Tu peux nous parler de ton parcours ? Est-ce qu’à ce moment-là tu rêvais de devenir joueur professionnel ?

Je n’avais aucun objectif quand j’ai commencé. Je suis arrivé là par hasard à 14-15 ans, j’avais des amis du collège qui s’étaient inscrits, et j’y suis allé par curiosité. Petit à petit, je me suis fait repérer, j’y ai pris gout, j’ai pris plus de plaisir à jouer au volley. J’ai progressé assez vite, échelon après échelon, je suis arrivé à un haut niveau. Quand j’ai commencé, ce n’était même pas envisageable de me dire « je vais finir joueur pro ». Ce n’était même pas un rêve, c’était improbable. Puis avec les opportunités qui se présentent, on commence à y croire.

Tu as commencé à pratiquer assez tard…

Oui, j’avais fait beaucoup de natation avant. Après ce n’est pas si tard, même si certains gars de l’équipe ont commencé à 7-8 ans. Il n’est jamais trop tard. Tout s’est vite enchainé, un an après avoir commencé je rentrais en pole espoir, ça commençait à être plus sérieux. On part de la maison, on rentre en sport étude, ça prend une place plus importante dans notre vie. Un an après, j’ai commencé en équipe de France cadet, c’est devenu plus concret. Puis je suis arrivé en Équipe de France junior, j’ai signé mon contrat pro. Chaque année je passais un pallier, s’est allé très vite.

As-tu un petit mot à adresser aux jeunes inscrits dans des clubs ou ceux qui veulent s’inscrire et commencer à jouer au volley ?

Si je n’ai qu’un seul mot, c’est de ne pas hésiter, de foncer. Même s’ils n’ont jamais joué ou qu’ils pensent que c’est trop tard pour percer, il n’y a pas de règle. Avec de la volonté et du travail, on y a arrive. Même s’ils ne pourront pas atteindre le haut niveau, le principal c’est de prendre du plaisir. Le volley est un sport magnifique, avec un état d’esprit et un esprit d’équipe extraordinaire. Donc foncez !

Interview réalisée le 26 août 2021


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